Manuscrit d'une dernière lettre

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Dernière Lettre


 Je v' écris, très chère, du bois d'x...

Vous savez que l'on me défend d'être prolixe,

je ne puis donc nommer plus clairement l'endroit.

Des chênes tout gibbeux et des sapins tout droits

forment un cadre agreste et dont je m'accommode

tandis qu'autour de moi l'on joue aux dés, je brode

des poèmes a votre  los , cela vaut mieux.

J'évoque votre front, vos lèvres et vos yeux

et je sens qu'à jamais se sont jointes nos âmes.

Depuis le tendre aveu qu'un soir n' échangeâmes

au fond d'un noir taxi filant comme le vent...

et sous ces souvenirs grisent mon cœur fervent!

  J'écoute aussi jaser les ruisseaux et recueilli

les mots que le zéphir inconstant dit aux feuilles.

Et lorsque le canon  raile  sinistrement

sa lugubre rumeur à ces hymnes charmants

et qu'une mitrailleuse au loin, en embuscade,

crépite, ainsi qu'un fouet qui claque par saccades,

ma foi, je ne prends pas plus garde à ces vains bruits

que  vous au  roulement des fiacres dans la nuit.
Car vous seule occupez mon pensée et, sans trêve,

comme une vision surgie au fond d'un rêve,

vous paraissez partout où je pose mes pas.

Ainsi, dans la forêt où je rêve, il n'est pas

de clairière, il n'est pas de  hailler  ni de sente

d'où mon amour n'ait senti une heure absente,

du ténébreux Décembre au radieux Avril.

  Nous n'avons pas couru jusqu'alors grand péril,

à peine avons-nous vu planer sur nous leurs taubes.

Mais notre tour approche. A la pointe de l'aube,

demain, nous attaquons Messieurs les Bavarois :

ce sera beau, car nous serons un contre trois.

On dit que l'objectif est une vieille ferme.

La place est dangereuse et nous taperons ferme,

 page droite 

chacun s'étant juré de tenir jusqu'au bout.

En pensant au combat de demain mon sang missing.

Je me dis qu'il serait plus sage de me taire

et qu'il vaudrait mieux vous épargnez le chagrin

des noirs pressentiments dont je me sens étreints,

mais je ne puis cacher mes angoisses secrètes

à l'Amie inéffable et tendre que vous êtes.

Je ne puis vous cacher que notre section

doit se sacrifier au front de l'action

et, frayant le chemin, montrer l'exemple aux autres.

Je suis certain de n'en pas revenir. Les nôtres,

quand le "communiqué" notera leurs exploits,

ne seront plus que des cadavres déjà froids.

C'est pourquoi ces derniers vers que je vous adresse

vous portent le suprême élan de ma tendresse.

----

Si nous sommes vainqueurs ne prenez pas mon deuil

et que ce soit moins la tristesse que l'orgueil

qui de vos yeux si beaux fasse couler des larmes.

Mais plus tard, quand la France aura posé les armes,

venez vers les forêts et les champs dévastés

où mes amis et moi nous serons tous restés;

oui très Chère, venez à l'heure où le soir tombe

errer mélancoliquement devant nos tombes.

Et songez que je suis mort sans crainte, parmi

tous ces braves, le front tourné vers l'ennemi,

évoquant les bonheurs dont le Destin me sèvre,

mon grand amour au cœur et votre nom

aux lèvres!


Max Ligardès

Commis à Paris 80

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Dernière Lettre


 Je v' écris, très chère, du bois d'x...

Vous savez que l'on me défend d'être prolixe,

je ne puis donc nommer plus clairement l'endroit.

Des chênes tout gibbeux et des sapins tout droits

forment un cadre agreste et dont je m'accommode

tandis qu'autour de moi l'on joue aux dés, je brode

des poèmes a votre  los , cela vaut mieux.

J'évoque votre front, vos lèvres et vos yeux

et je sens qu'à jamais se sont jointes nos âmes.

Depuis le tendre aveu qu'un soir n' échangeâmes

au fond d'un noir taxi filant comme le vent...

et sous ces souvenirs grisent mon cœur fervent!

  J'écoute aussi jaser les ruisseaux et recueilli

les mots que le zéphir inconstant dit aux feuilles.

Et lorsque le canon  raile  sinistrement

sa lugubre rumeur à ces hymnes charmants

et qu'une mitrailleuse au loin, en embuscade,

crépite, ainsi qu'un fouet qui claque par saccades,

ma foi, je ne prends pas plus garde à ces vains bruits

que  vous au  roulement des fiacres dans la nuit.
Car vous seule occupez mon pensée et, sans trêve,

comme une vision surgie au fond d'un rêve,

vous paraissez partout où je pose mes pas.

Ainsi, dans la forêt où je rêve, il n'est pas

de clairière, il n'est pas de  hailler  ni de sente

d'où mon amour n'ait senti une heure absente,

du ténébreux Décembre au radieux Avril.

  Nous n'avons pas couru jusqu'alors grand péril,

à peine avons-nous vu planer sur nous leurs taubes.

Mais notre tour approche. A la pointe de l'aube,

demain, nous attaquons Messieurs les Bavarois :

ce sera beau, car nous serons un contre trois.

On dit que l'objectif est une vieille ferme.

La place est dangereuse et nous taperons ferme,

 page droite 

chacun s'étant juré de tenir jusqu'au bout.

En pensant au combat de demain mon sang missing.

Je me dis qu'il serait plus sage de me taire

et qu'il vaudrait mieux vous épargnez le chagrin

des noirs pressentiments dont je me sens étreints,

mais je ne puis cacher mes angoisses secrètes

à l'Amie inéffable et tendre que vous êtes.

Je ne puis vous cacher que notre section

doit se sacrifier au front de l'action

et, frayant le chemin, montrer l'exemple aux autres.

Je suis certain de n'en pas revenir. Les nôtres,

quand le "communiqué" notera leurs exploits,

ne seront plus que des cadavres déjà froids.

C'est pourquoi ces derniers vers que je vous adresse

vous portent le suprême élan de ma tendresse.

----

Si nous sommes vainqueurs ne prenez pas mon deuil

et que ce soit moins la tristesse que l'orgueil

qui de vos yeux si beaux fasse couler des larmes.

Mais plus tard, quand la France aura posé les armes,

venez vers les forêts et les champs dévastés

où mes amis et moi nous serons tous restés;

oui très Chère, venez à l'heure où le soir tombe

errer mélancoliquement devant nos tombes.

Et songez que je suis mort sans crainte, parmi

tous ces braves, le front tourné vers l'ennemi,

évoquant les bonheurs dont le Destin me sèvre,

mon grand amour au cœur et votre nom

aux lèvres!


Max Ligardès

Commis à Paris 80


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  • October 21, 2018 10:34:12 Sara Fresi

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    Dernière Lettre


     Je v' écris, très chère, du bois d'x...

    Vous savez que l'on me défend d'être prolixe,

    je ne puis donc nommer plus clairement l'endroit.

    Des chênes tout gibbeux et des sapins tout droits

    forment un cadre agreste et dont je m'accommode

    tandis qu'autour de moi l'on joue aux dés, je brode

    des poèmes a votre  los , cela vaut mieux.

    J'évoque votre front, vos lèvres et vos yeux

    et je sens qu'à jamais se sont jointes nos âmes.

    Depuis le tendre aveu qu'un soir n' échangeâmes

    au fond d'un noir taxi filant comme le vent...

    et sous ces souvenirs grisent mon cœur fervent!

      J'écoute aussi jaser les ruisseaux et recueilli

    les mots que le zéphir inconstant dit aux feuilles.

    Et lorsque le canon  raile  sinistrement

    sa lugubre rumeur à ces hymnes charmants

    et qu'une mitrailleuse au loin, en embuscade,

    crépite, ainsi qu'un fouet qui claque par saccades,

    ma foi, je ne prends pas plus garde à ces vains bruits

    que  vous au  roulement des fiacres dans la nuit.
    Car vous seule occupez mon pensée et, sans trêve,

    comme une vision surgie au fond d'un rêve,

    vous paraissez partout où je pose mes pas.

    Ainsi, dans la forêt où je rêve, il n'est pas

    de clairière, il n'est pas de  hailler  ni de sente

    d'où mon amour n'ait senti une heure absente,

    du ténébreux Décembre au radieux Avril.

      Nous n'avons pas couru jusqu'alors grand péril,

    à peine avons-nous vu planer sur nous leurs taubes.

    Mais notre tour approche. A la pointe de l'aube,

    demain, nous attaquons Messieurs les Bavarois :

    ce sera beau, car nous serons un contre trois.

    On dit que l'objectif est une vieille ferme.

    La place est dangereuse et nous taperons ferme,

     page droite 

    chacun s'étant juré de tenir jusqu'au bout.

    En pensant au combat de demain mon sang missing.

    Je me dis qu'il serait plus sage de me taire

    et qu'il vaudrait mieux vous épargnez le chagrin

    des noirs pressentiments dont je me sens étreints,

    mais je ne puis cacher mes angoisses secrètes

    à l'Amie inéffable et tendre que vous êtes.

    Je ne puis vous cacher que notre section

    doit se sacrifier au front de l'action

    et, frayant le chemin, montrer l'exemple aux autres.

    Je suis certain de n'en pas revenir. Les nôtres,

    quand le "communiqué" notera leurs exploits,

    ne seront plus que des cadavres déjà froids.

    C'est pourquoi ces derniers vers que je vous adresse

    vous portent le suprême élan de ma tendresse.

    ----

    Si nous sommes vainqueurs ne prenez pas mon deuil

    et que ce soit moins la tristesse que l'orgueil

    qui de vos yeux si beaux fasse couler des larmes.

    Mais plus tard, quand la France aura posé les armes,

    venez vers les forêts et les champs dévastés

    où mes amis et moi nous serons tous restés;

    oui très Chère, venez à l'heure où le soir tombe

    errer mélancoliquement devant nos tombes.

    Et songez que je suis mort sans crainte, parmi

    tous ces braves, le front tourné vers l'ennemi,

    évoquant les bonheurs dont le Destin me sèvre,

    mon grand amour au cœur et votre nom

    aux lèvres!


    Max Ligardès

    Commis à Paris 80

  • October 21, 2018 10:34:04 Sara Fresi
  • February 6, 2018 19:17:16 Thomas A. Lingner

     page gauche 

    Dernière Lettre


     Je v' écris, très chère, du bois d'x...

    Vous savez que l'on me défend d'être prolixe,

    je ne puis donc nommer plus clairement l'endroit.

    Des chênes tout gibbeux et des sapins tout droits

    forment un cadre agreste et dont je m'accommode

    tandis qu'autour de moi l'on joue aux dés, je brode

    des poèmes a votre  los , cela vaut mieux.

    J'évoque votre front, vos lèvres et vos yeux

    et je sens qu'à jamais se sont jointes nos âmes.

    Depuis le tendre aveu qu'un soir n' échangeâmes

    au fond d'un noir taxi filant comme le vent...

    et sous ces souvenirs grisent mon cœur fervent!

      J'écoute aussi jaser les ruisseaux et recueilli

    les mots que le zéphir inconstant dit aux feuilles.

    Et lorsque le canon  raile  sinistrement

    sa lugubre rumeur à ces hymnes charmants

    et qu'une mitrailleuse au loin, en embuscade,

    crépite, ainsi qu'un fouet qui claque par saccades,

    ma foi, je ne prends pas plus garde à ces vains bruits

    que  vous au  roulement des fiacres dans la nuit.
    Car vous seule occupez mon pensée et, sans trêve,

    comme une vision surgie au fond d'un rêve,

    vous paraissez partout où je pose mes pas.

    Ainsi, dans la forêt où je rêve, il n'est pas

    de clairière, il n'est pas de  hailler  ni de sente

    d'où mon amour n'ait senti une heure absente,

    du ténébreux Décembre au radieux Avril.

      Nous n'avons pas couru jusqu'alors grand péril,

    à peine avons-nous vu planer sur nous leurs taubes.

    Mais notre tour approche. A la pointe de l'aube,

    demain, nous attaquons Messieurs les Bavarois :

    ce sera beau, car nous serons un contre trois.

    On dit que l'objectif est une vieille ferme.

    La place est dangereuse et nous taperons ferme,

     page droite 

    chacun s'étant juré de tenir jusqu'au bout.

    En pensant au combat de demain mon sang missing.

    Je me dis qu'il serait plus sage de me taire

    et qu'il vaudrait mieux vous épargnez le chagrin

    des noirs pressentiments dont je me sens étreints,

    mais je ne puis cacher mes angoisses secrètes

    à l'Amie inéffable et tendre que vous êtes.

    Je ne puis vous cacher que notre section

    doit se sacrifier au front de l'action

    et, frayant le chemin, montrer l'exemple aux autres.

    Je suis certain de n'en pas revenir. Les nôtres,

    quand le "communiqué" notera leurs exploits,

    ne seront plus que des cadavres déjà froids.

    C'est pourquoi ces derniers vers que je vous adresse

    vous portent le suprême élan de ma tendresse.

    ----

    Si nous sommes vainqueurs ne prenez pas mon deuil

    et que ce soit moins la tristesse que l'orgueil

    qui de vos yeux si beaux fasse couler des larmes.

    Mais plus tard, quand la France aura posé les armes,

    venez vers les forêts et les champs dévastés

    où mes amis et moi nous serons tous restés;

    oui très Chère, venez à l'heure où le soir tombe

    errer mélancoliquement devant nos tombes.

    Et songez que je suis mort sans crainte, parmi

    tous ces braves, le front tourné vers l'ennemi,

    évoquant les bonheurs dont le Destin me sèvre,

    mon grand amour au cœur et votre nom

    aux lèvres!


    Max Ligardès

    Commis à Paris 80


  • February 6, 2018 19:16:15 Thomas A. Lingner

     page gauche 

    Dernière Lettre


     Je v' écris, très chère, du bois d'x...

    Vous savez que l'on me défend d'être prolixe,

    je ne puis donc nommer plus clairement l'endroit.

    Des chênes tout gibbeux et des sapins tout droits

    forment un cadre agreste et dont je m'accommode

    tandis qu'autour de moi l'on joue aux dés, je brode

    des poèmes a votre  los , cela vaut mieux.

    J'évoque votre front, vos lèvres et vos yeux

    et je sens qu'à jamais se sont jointes nos âmes.

    Depuis le tendre aveu qu'un soir n' échangeâmes

    au fond d'un noir taxi filant comme le vent...

    et sous ces souvenirs grisent mon cœur fervent!

      J'écoute aussi jaser les ruisseaux et recueilli

    les mots que le zéphir inconstant dit aux feuilles.

    Et lorsque le canon  raile  sinistrement

    sa lugubre rumeur à ces hymnes charmants

    et qu'une mitrailleuse au loin, en embuscade,

    crépite, ainsi qu'un fouet qui claque par saccades,

    ma foi, je ne prends pas plus garde à ces vains bruits

    que  vous au  roulement des fiacres dans la nuit.
    Car vous seule occupez mon pensée et, sans trêve,

    comme une vision surgie au fond d'un rêve,

    vous paraissez partout où je pose mes pas.

    Ainsi, dans la forêt où je rêve, il n'est pas

    de clairière, il n'est pas de  hailler  ni de sente

    d'où mon amour n'ait senti une heure absente,

    du ténébreux Décembre au radieux Avril.

      Nous n'avons pas couru jusqu'alors grand péril,

    à peine avons-nous vu planer sur nous leurs taubes.

    Mais notre tour approche. A la pointe de l'aube,

    demain, nous attaquons Messieurs les Bavarois :

    ce sera beau, car nous serons un contre trois.

    On dit que l'objectif est une vieille ferme.

    La place est dangereuse et nous taperons ferme,

     page droite 

    chacun s'étant juré de tenir jusqu'au bout.

    En pensant au combat de demain mon sang missing.

    Je me dis qu'il serait plus sage de me taire

    et qu'il vaudrait mieux vous épargnez le chagrin

    des noirs pressentiments dont je me sens étreints,

    mais je ne puis cacher mes angoisses secrètes

    à l'Amie inéffable et tendre que vous êtes.

    Je ne puis vous cacher que notre section

    doit se sacrifier au front de l'action

    et, frayant le chemin, montrer l'exemple aux autres.

    Je suis certain de n'en pas revenir. Les nôtres,

    quand le "communiqué" notera leurs exploits,

    ne seront plus que des cadavres déjà froids.

    C'est pourquoi ces derniers vers que je vous adresse

    vous portent le suprême élan de ma tendresse.

    ----

    Si nous sommes vainqueurs ne prenez pas mon deuil

    et que ce soit moins la tristesse que l'orgueil

    qui de vos yeux si beaux fasse couler des larmes.

    Mais plus tard, quand la France aura posé les armes,

    venez vers les forêts et les champs dévastés

    où mes amis et moi nous serons tous restés;

    oui très Chère, venez à l'heure où le soir tombe

    errer mélancoliquement devant nos tombes.

    Et songez que je suis mort sans crainte, parmi

    tous ces braves, le front tourné vers l'ennemi,

    évoquant les bonheurs dont le Destin me sèvre,

    mon grand amour au cœur et votre nom

    aux lèvres!


    Max Ligartes

    Commis à Paris 80


  • February 6, 2018 18:57:54 Thomas A. Lingner

    Dernière Lettre

     

     Je v' écris, très chère, du bois d'x...

    Vous savez que l'on me défend d'être prolixe,

    je ne puis donc nommer plus clairement l'endroit.

    Des chênes tout gibbeux et des sapins tout droits

    forment un cadre agreste et dont je m'accommode

    tandis qu'autour de moi l'on joue aux dés, je brode

    des poèmes a votre  los , cela vaut mieux.

    J'évoque votre front, vos lèvres et vos yeux

    et je sens qu'à jamais se sont jointes nos âmes.

    Depuis le tendre aveu qu'un soir n' échangeâmes

    au fond d'un noir taxi filant comme le vent...

    et sous ces souvenirs grisent mon cœur fervent!

      J'écoute aussi jaser les ruisseaux et recueilli

    les mots que le zéphir inconstant dit aux feuilles.

    Et lorsque le canon  raile  sinistrement

    sa lugubre rumeur à ces hymnes charmants

    et qu'une mitrailleuse au loin, en embuscade,

    crépite, ainsi qu'un fouet qui claque par saccades,

    ma foi, je ne prends pas plus garde à ces vains bruits

    que  vous au  roulement des fiacres dans la nuit.
    Car vous seule occupez mon pensée et, sans trêve,

    comme une vision surgie au fond d'un rêve,

    vous paraissez partout où je pose mes pas.

    Ainsi, dans la forêt où je rêve, il n'est pas de clairière, il n'est pas de tailler ni de sente d'où mon amour n'ait senti une

    heure absente, du ténébreux Décembre au radieux Avril.

      Nous n'avons pas couru jusqu'alors grand péril, à peine avons-nous vu planer sur

    nous leurs taubes. Mais notre tour approche. A la pointe de l'aube, demain, nous attaquons

    Messieurs les Bavarois : ce sera beau, car nous serons un contre trois. On dit que l'objectif 

    est une vieille ferme. La place est dangereuse et nous taperons ferme, chacun s'étant tué de

    tenir jusqu'au bout.

      En pensant au combat de demain mon sang bout. Je me dis qu'il serait plus sage de

    me taire et qu'il vaudrait mieux vous épargnez le chagrin des noirs pressentiments dont je

    me sens étreint, mais je ne puis cacher mes angoisses secrètes à l'Amie ineffable et tendre

    que vous êtes. Je ne puis vous cacher que notre section doit se sacrificiel au front de l'action

    et, frayant le chemin, montrer l'exemple aux autres.

      Je suis certain de n'en pas revenir. Les nôtres, quand le "communiqué" notera leurs

    exploits, ne seront plus que des cadavres déjà froids. C'est pourquoi ces derniers vers que je

    vous adresse vous portent le suprême élan de ma tendresse.

      Si nous sommes vainqueurs ne prenez pas mon deuil et que ce soit moins la tristesse

    que l'orgueil qui de vos yeux si beaux fasse couler des larmes. Mais plus tard, quand la

    France aura posé les armes, venez vers les forêts et les champs dévastés où mes amis et moi

    nous serons tous restés; oui très Chère, venez à l'heure où le soir tombe errer

    mélancoliquement devant nos tombes.

      Et songes que je suis mort sans crainte, parmi tous ces braves, le front tourné vers

    l'ennemi, évoquant les bonheurs dont le Destin me sèvre, mon grand amour au cœur et votre

    nom aux lèvres!



  • February 6, 2018 01:31:31 Thomas A. Lingner

    Dernière Lettre

     

     Je v' écris, très chère, du bois d'x...

    Vous savez que l'on me défend d'être prolixe,

    je ne puis donc nommer plus clairement l'endroit.

    Des chênes tout gibbeux et des sapins tout droits

    forment un cadre agreste et dont je m'accommode

    tandis qu'autour de moi l'on joue aux dés, je brode

    des poèmes a votre  los , cela vaut mieux.

    J'évoque votre front, vos lèvres et vos yeux

    et je sens qu'à jamais se sont jointes nos âmes.

    Depuis le tendre aveu qu'un soir n' échangeâmes

    au fond d'un noir taxi filant comme le vent...

    et sous ces souvenirs grisent mon cœur fervent!

      J'écoute aussi jaser les ruisseaux et recueilli

    les mots que le zéphir inconstant dit aux feuilles.

    Et lorsque le canon  raile  sinistrement

    sa lugubre rumeur à ces hymnes charmants

    et qu'une mitrailleuse au loin, en embuscade,

    crépite, ainsi qu'un fouet qui claque par saccades,

    ma foi, je ne prends pas plus garde à ces vains bruits

    que  vous au  roulement des fiacres dans la nuit.
    Car vous seule occupez a pensée et, sans trêve,



    comme une vision surgie

    au fond d'un rêve, vous paraissez partout où je pose mes pas. Ainsi dans la forêt où je rêve il

    n'est pas de clairière, il n'est pas de tailler ni de sente d'où mon amour n'ait senti une

    heure absente, du ténébreux Décembre au radieux Avril.

      Nous n'avons pas couru jusqu'alors grand péril, à peine avons-nous vu planer sur

    nous leurs taubes. Mais notre tour approche. A la pointe de l'aube, demain, nous attaquons

    Messieurs les Bavarois : ce sera beau, car nous serons un contre trois. On dit que l'objectif 

    est une vieille ferme. La place est dangereuse et nous taperons ferme, chacun s'étant tué de

    tenir jusqu'au bout.

      En pensant au combat de demain mon sang bout. Je me dis qu'il serait plus sage de

    me taire et qu'il vaudrait mieux vous épargnez le chagrin des noirs pressentiments dont je

    me sens étreint, mais je ne puis cacher mes angoisses secrètes à l'Amie ineffable et tendre

    que vous êtes. Je ne puis vous cacher que notre section doit se sacrificiel au front de l'action

    et, frayant le chemin, montrer l'exemple aux autres.

      Je suis certain de n'en pas revenir. Les nôtres, quand le "communiqué" notera leurs

    exploits, ne seront plus que des cadavres déjà froids. C'est pourquoi ces derniers vers que je

    vous adresse vous portent le suprême élan de ma tendresse.

      Si nous sommes vainqueurs ne prenez pas mon deuil et que ce soit moins la tristesse

    que l'orgueil qui de vos yeux si beaux fasse couler des larmes. Mais plus tard, quand la

    France aura posé les armes, venez vers les forêts et les champs dévastés où mes amis et moi

    nous serons tous restés; oui très Chère, venez à l'heure où le soir tombe errer

    mélancoliquement devant nos tombes.

      Et songes que je suis mort sans crainte, parmi tous ces braves, le front tourné vers

    l'ennemi, évoquant les bonheurs dont le Destin me sèvre, mon grand amour au cœur et votre

    nom aux lèvres!



  • February 6, 2018 01:28:04 Thomas A. Lingner

    Dernière Lettre

     

     Je v' écris, très chère, du bois d'x...

    Vous savez que l'on me défend d'être prolixe,

    je ne puis donc nommer plus clairement l'endroit.

    Des chênes tout gibbeux et des sapins tout droits

    forment un cadre agreste et dont je m'accommode

    tandis qu'autour de moi l'on joue aux dés, je brode

    des poèmes a votre  los , cela vaut mieux.

    J'évoque votre front, vos lèvres et vos yeux

    et je sens qu'à jamais se sont jointes nos âmes.

    Depuis le tendre aveu qu'un soir n' échangeâmes

    au fond d'un noir taxi filant comme le vent...

    et sous ces souvenirs grisent mon cœur fervent!

      J'écoute aussi jaser les ruisseaux et recueilli

    les mots que le zéphir inconstant dit aux feuilles.

    Et lorsque le canon même sinistrement sa lugubre rumeur à ces hymnes charmants

    et qu'une mitrailleuse au loin, en embuscade, crépite ainsi qu'un fouet qui claque par

    saccades, ma foi je ne prends le plus garde à ces vains bruits que vous au roulement des

    fiacres dans la nuit. Car vous seule occupez a pensée et, sans trêve, comme une vision surgie

    au fond d'un rêve, vous paraissez partout où je pose mes pas. Ainsi dans la forêt où je rêve il

    n'est pas de clairière, il n'est pas de tailler ni de sente d'où mon amour n'ait senti une

    heure absente, du ténébreux Décembre au radieux Avril.

      Nous n'avons pas couru jusqu'alors grand péril, à peine avons-nous vu planer sur

    nous leurs taubes. Mais notre tour approche. A la pointe de l'aube, demain, nous attaquons

    Messieurs les Bavarois : ce sera beau, car nous serons un contre trois. On dit que l'objectif 

    est une vieille ferme. La place est dangereuse et nous taperons ferme, chacun s'étant tué de

    tenir jusqu'au bout.

      En pensant au combat de demain mon sang bout. Je me dis qu'il serait plus sage de

    me taire et qu'il vaudrait mieux vous épargnez le chagrin des noirs pressentiments dont je

    me sens étreint, mais je ne puis cacher mes angoisses secrètes à l'Amie ineffable et tendre

    que vous êtes. Je ne puis vous cacher que notre section doit se sacrificiel au front de l'action

    et, frayant le chemin, montrer l'exemple aux autres.

      Je suis certain de n'en pas revenir. Les nôtres, quand le "communiqué" notera leurs

    exploits, ne seront plus que des cadavres déjà froids. C'est pourquoi ces derniers vers que je

    vous adresse vous portent le suprême élan de ma tendresse.

      Si nous sommes vainqueurs ne prenez pas mon deuil et que ce soit moins la tristesse

    que l'orgueil qui de vos yeux si beaux fasse couler des larmes. Mais plus tard, quand la

    France aura posé les armes, venez vers les forêts et les champs dévastés où mes amis et moi

    nous serons tous restés; oui très Chère, venez à l'heure où le soir tombe errer

    mélancoliquement devant nos tombes.

      Et songes que je suis mort sans crainte, parmi tous ces braves, le front tourné vers

    l'ennemi, évoquant les bonheurs dont le Destin me sèvre, mon grand amour au cœur et votre

    nom aux lèvres!



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  • 48.856614||2.3522219||

    Paris

  • 49.894067||2.2957529999999906||

    depuis le front, du Boix d'x... (nom pas dévoilé)

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  • Story location depuis le front, du Boix d'x... (nom pas dévoilé)
  • Document location Paris
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ID
8198 / 81760
Source
http://europeana1914-1918.eu/...
Contributor
CORDEAU
License
http://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/


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